Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur – Harper Lee (Lecture commune)

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Titre original : To kill a Mockingbird

Genre : Tranche de vie, historique, drame.

Éditions : Le livre de poche

Nombres de pages : 434 pages

Avis d’Aurélie

J’attendais beaucoup de ce livre et c’est avec plaisir que je me suis jeté dedans ! Il y a un petit moment que j’avais envie de m’y plonger, intriguée par la quatrième de couverture et cette époque de l’histoire américaine qui attise pas mal ma curiosité. Ainsi, je m’attendais à voir le récit d’un procès qui aurait bousculé les habitudes et les certitudes d’un petit village du Sud.

Autant le dire tout de suite, je ne sais toujours pas quoi penser de ma lecture. Je l’ai apprécié c’est sûr et je ne peux nier qu’il soit très bien écrit mais je reste sur ma faim. J’ai l’impression que l’on m’a trompé sur le contenu et même si le roman est très sympathique à lire et que ma lecture fut agréable, je ne pouvais m’empêcher d’attendre ce que l’on m’avait promis dans le résumé.

Nous suivons ainsi Scout, la fille de l’avocat qui défendra un Noir accusé d’avoir violé une Blanche. Ce point de vue m’a surprise quand on voit le sujet abordé. Il a fallu au moins une bonne centaine de pages pour en arriver au moment où Atticus commence à prendre l’affaire qui devrait être le centre de l’histoire. Du coup, une bonne partie du livre est plus consacrée à l’enfance à cette époque qu’à autre chose. Cela reste intéressant, mignon et plein de fraicheur de voir le monde à travers les yeux innocents des enfants qui grossissent tout ou ne comprennent pas les choses de la même manière que les adultes.

Le point de vue enfantin de Scout nous permet de voir les évènements discriminatoires, violents et racistes avec l’innocence bienveillante que l’on a à cet âge-là. Élevée dans la tolérance et pas encore abîmée par la vie et les discours des adultes, Scout permet de prendre du recul sur les affirmations et traditions ridicules de ces personnes censées être plus sages qu’elle. Le point de vue est intéressant pour faire comprendre à chacun que les différences de couleurs de peau comme les injustices faites aux uns et aux autres sont ridicules. Cependant, il y a justement trop de distance entre les évènements et le lecteur. C’est comme si on observait les choses de loin et, même si on interprète ce que voit la petite fille avec nos yeux à nous et même si on comprend certaines choses il nous manque beaucoup de détails et on n’arrive pas à suivre l’affaire comme on le voudrait. Du moins, j’ai personnellement été frustrée par cet aspect-là de la rédaction. Finalement, le passage du tribunal est sans aucun doute celui qui m’a le plus passionnée puisqu’on entre enfin dans le vif du sujet.

Pour ce qui est des personnages, je les ai trouvé en général très attachants. Que ce soit Atticus, ses enfants, la voisine ou d’autres encore ils ont tous leurs identités propres et sont parfaitement développés. On s’attache à eux, et on apprécie de les croiser au fil des pages. Mon personnage préféré reste quand même Atticus que j’ai trouvé digne, courageux et d’une sagesse étonnante quand on voit le milieu dans lequel il a du évoluer.

Quant à la fin, même si elle referme une boucle, je reste sur ma faim. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai cette sensation d’inachevé ou de fermeture brutale.

En bref, j’ai apprécié ma lecture mais ce n’est pas ce à quoi je m’étais attendue ce qui m’a un peu déçue.

Avis de Anne

Je pensais vraiment adorer ce grand classique de la littérature américaine ; De par son statut de classique, de par la résonnance qu’il a eu dans les consciences collectives et les thèmes abordés, il était pour moi impensable que je passe à coté de ce livre. Et pourtant, force est de constater que je ressors perplexe de ma lecture ne comprenant pas totalement l’engouement qu’il a suscité. Sans pour autant que ce soit un flop complet et tout en lui accordant le mérite et l’intérêt qu’il convient, il ne m’a pas plu autant que je l’espérais et je pense savoir pourquoi.

Dans Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, Harper Lee donne la parole à Scout, petite fille du sud de l’Amérique dans son quotidien, entre convenances sociales, préjugés raciaux et moraux, école, jeux etc. A travers les yeux de Scout, nous est parfaitement décrit ce que devait être cette Amérique là des années 30.

L’écriture est fluide, enfantine par sa naïveté sans toutefois tomber dans l’idiotie. Scout est tour à tour actrice et observatrice des événements, fait entendre ses opinions d’enfants, déduit beaucoup de choses très vraies des conversations de « grandes personnes » auquel elle n’est pas à priori censée participer.

Rien a dire donc du parti pris de l’auteur préférant utiliser une enfant qu’un adulte pour en être le personnage fil de son roman. Cependant, c’est cette narration choisie qui m’a laissé perplexe.

Tout en la comprenant, car on se rend bien compte que le début et la fin sont liés, et que Scout-narratrice était indispensable à la construction du roman tel que le voulait Harper Lee, j’ai malgré tout trouvé que l’intention de l’auteur de faire parler une enfant, qui – bien que très maline, intuitive et observatrice – reste une petite fille, ne permettait pas au lecteur d’aller en profondeur du propos.

Le racisme, la ségrégation et les procès injustement menés sont des affaires trop graves pour que s’y attelle une enfant. J’aurais mille fois mieux aimé que le récit soit fait par le père ou même une des voisines.

Car en fin de compte, ce qui aurait du être le sujet principal du livre – le procès d’un noir condamné pour avoir violé une blanche – devient presque secondaire tellement l’accent est mis sur les enfants et leur vision de la vie, et quasi tout les faits inhérents à l’affaire ne sont que suggérés à demi-mots, non pas par pudeur mais bien par manque de connaissance ( logique puisque les protagonistes principaux sont des enfants)

En bref, il aurait mieux valu que le résumé mette l’accent sur le fait que ce livre soit un roman initiatique plutôt qu’un réquisitoire pour les droits de l’homme car sincèrement, vu la vitesse et le peu de précisions et d’attachement apportés au procès, je ne me suis jamais sentie en empathie avec le condamné ou sa famille.

D’ailleurs, l’intrigue « Tom Robinson coupable ou non ? » s’est bien vite refermé d’une façon abrupte et presqu’irrespectueuse pour le personnage.

Je finirais pas dire que j’ai été jusqu’à me demander, en refermant le livre, si son succès n’était pas du à l’époque de parution ( 1960 ) ou les droits des noirs étaient un des sujets d’actualité de la politique américaine – un peu à la manière de Soumission de Houellebeck qui, paru dans la meme période que les événements du 7 janvier 2015 fut un tabac commercial.

Ce livre a t’il fonctionné car sorti au bon moment ?

Avouez, que pour un classique, c’est vraiment dommage de soupçonner un vulgaire coup de chance. Je temporiserai mon propos en évoquant le fait que depuis 1960, il s’en est passé des choses, et que le livre reste un best seller de librairie. Donc ma dernière remarque est facilement opposable.

Cela dit, je vous conseille de le lire, pour vous faire votre propre idée et parqu’il est pour beaucoup un de ces livres qu’on ne peut pas oublier. Mais personnellement, et même si je ne regrette pas de l’avoir lu, je n’en garderai pas un souvenir impérissable.

 

Et vous l’avez-vous lu ? Qu’en avez vous pensé ? Quel en est votre souvenir ? N’hésitez pas à partager votre avis avec nous 🙂

Aurélie et Anne

Rentre dans le cadre du challenge « Ces livres que je n’ai toujours pas lus »

Nous finissons l’article en vous annoncant malheureusement la mort de Mme Harper Lee survenue vendredi dernier. Bien que notre impression de lecture de l’oiseau moqueur soit en demi-teinte, nous reconnaissons et louons l’impact qu’il a eu sur les consciences et sur la politique ségrégationniste américaine.

Et c’est en cela que nous disons à l’unisson : Bravo Mme Lee, et bon voyage. 

 

16 commentaires

    • Lors du procès c’est justement là que l’on a le plus de détails sur l’affaire. pour ma père c’est l’avant qui est mal renseigné et j’avais beaucoup de frustration à l’idée de manquer tout le processus et tout ce que vivait Atticus face à tout cela. On ne sait que ce que disent les rumeurs et c’est à la fois intéressant dans l’écriture mais terriblement frustrant et décevant pour le lecteur. Enfin, après ce n’est que notre avis 🙂

      Aurélie

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  1. Je l’ai lu il y a quelques années et j’en garde un souvenir excellent. Pour le coup, je ne me souviens pas avoir manqué d’éléments pendant le procès, vu des yeux de Scout… d’ailleurs, qu’est ce qu’on peut s’y attacher à cette petite fille !

    (Juste un détail, mais le titre original est To kill et non pas Don’t) 🙂

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    • C’est vrai qu’elle reste attachante ! D’ailleurs, j’aimerais assez lire l’ultime roman de l’auteur, ou on retrouve Scout 20 ans après ( de mémoire ).

      c’est vrai qu’il n’y aucune zone d’ombre quand au déroulé des événements et on comprends parfaitement les motivations de chacun etc mais personnellement, j’ai vraiment trouvé que le procès passait au second plan et ne prenait pas assez de place dans l’histoire pour qu’on y mette autant l’accent sur la quatrième de couverture.

      Et oui tout à fait ! Merci de l’avoir pointé du doigt, j’avais omis de vérifier, c’est réparé 🙂

      Anne.

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      • Non ?! C’est étonnant ! Lui qui était si droit et juste d’esprit.. Je ne me suis pas beaucoup renseigné sur l’histoire, je n’étais pas du tout au courant de ça et je peux comprendre ta réticence. Je le lirai quand même au moins pour voir comment Harper Lee explique ce changement radical dans les convictions de son personnage.

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  2. Bel hommage. J’ai lu votre chronique en diagonale je l’avoue, j’espère le sortir de ma PAL le mois prochain et je vais essayer de le lire avec un regard neuf.^^ Mais du coup, je n’en attend plus « trop ». Quand il y a trop d’éloges sur un livre, je suis souvent déçue malgré moi…

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    • C’est vrai qu’on a toujours peur d’être déçu quand on en attend trop d’un livre (en particulier quand tout le monde semble en avoir fait un coup de coeur !)

      Après il faut pouvoir se lancer et simplement le prendre pour ce qu’il est : le récit d’une enfance sur fond d’une affaire lié au racisme de l’époque. Si tu veux le lire, ne te bloque pas non plus, le livre n’est pas mauvais en soi c’est surtout qu’on a été surpris et déçue parce qu’on s’attendait à autre chose.

      Aurélie

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  3. C’est étonnant j’ai eu la même impression que vous : « ne pas savoir quoi penser de ce livre » lorsque j’ai fini « Va et poste une sentinelle », la suite de « ne tirez pas sur l’oiseau moqueur ».

    En réalité je n’ai pas lu le premier livre, je ne connaissais donc pas les personnages et j’ai fait connaissance avec le personnage de Scout, dans la vingtaine. On apprécie le décor qui est très bien amené… cependant je n’ai pas très bien compris ce roman, j’ai trouvé le personnage de Scout pas très maline, butée et peu ouverte au monde et à son entourage(malgré qu’elle soit aller vivre à New York)… Le personnage d’Atticus est également mon préféré, il n’est pas « devenu » raciste, enfin pas à mon sens, à vous de voir ce que vous retirerez du roman. En fait ce second volet est également un roman initiatique, le sujet (racisme…) est abordé mais n’est pas vraiment le point central du roman.
    Comme je le disais, je suis mitigée après ma lecture alors vous aurez sûrement d’autres avis. C’est peut être la qualité de ce livre, nous pousser à nous questionner ? En revanche il se lit très vite.

    K

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    • C’est assez dingue en effet, je ne pensais pas que les deux romans étaient si similaires que ça ! A te lire, j’ai vraiment l’impression qu’elle a tout transposé 20 ans après en reprenant la trame et les thématiques de son premier livre.. Je le lirai par curiosité parceque ce que tu en dis est très intéressant !
      Anne.

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